Tribus (Zünffte)


La ville est gouvernée par le Grand Conseil ou Grand Sénat (grosser Rath), composé d’un représentant de chaque tribu (1), soit vingt bourgeois, et de six patriciens (Constoffler). Depuis 1482, le nombre des tribus est fixé à vingt. La tribu a pour fonction de réglementer les différents corps de métier (Handwerck, Meisterschafft) qui la composent. Chaque bourgeois est rattaché à une tribu à laquelle il paie son impôt et qui lui donne des droits civiques. La tribu élit chaque année un collège d’échevins (Schöffen) présidé par un prévôt (Oberherr). Le maître de tribu (Zunfftmeister) est généralement chargé de rendre les comptes annuels. Les affaires professionnelles sont réglées par le conseil (Gericht). Chaque tribu possède son poêle (Zunfftstube) où elle tient ses réunions et qui sert généralement d’auberge. Le poêle est tenu par un huissier (Büttel) qui demeure sur place. Chaque tribu a son secrétaire (Zunfftschreiber) qui est souvent le notaire auquel s’adressent de préférence les différents membres.
Parmi les membres, on distingue les tributaires (Leibzünfftige, littéralement tributaires par corps) qui exercent un des métiers de la tribu, les rattachés (Zudiener) qui exercent une profession intellectuelle et les cotisants (Geldzünfftige, littéralement tributaires par écot), déjà membres d’une autre tribu, qui ont une double inscription pour pouvoir exercer une activité accessoire.
La tribu fait référence aux institutions romaines (comme sénat, consul, préteur). Elle se distingue de la corporation dont le rôle se limite aux affaires professionnelles.

Les vingt tribus : principaux métiers de leurs membres, emplacement de leur poêle. Elles sont désignées soit par leur métier principal (p. ex. Boulangers) soit par le nom de la maison où se trouve leur poêle (p. ex. Mauresse, Fribourgeois).
Elles sont présentées ci-dessous par ordre alphabétique. Elles portaient dans les Registres de la Taille un numéro d’ordre de 1 à 23 ; les Jardiniers occupant trois numéros (aux Charrons, au Faubourg de Pierre et à la Krutenau) et la Robertsau un numéro particulier.

  • Ancre (zum Ancker). Bateliers
    poêle IX 125 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 9, quai des Bateliers
  • Boulangers (Becker). Boulangers
    poêle derrière la cathédrale, VI 102 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 27, rue du Dôme
  • Charpentiers (Zimmerleuthe). Charpentiers, menuisiers, charrons, facteurs d’instruments de musique
    poêle III 254 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 15, rue de la Nuée-Bleue
  • Cordonniers (Schuhmacher). Cordonniers
    poêle VII 2 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 5, rue de la Chaîne et 14, rue des Cordonniers
  • Drapiers (Tücher). Drapiers, tisserands, chaussetiers, teinturiers
    poêle IV 227 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 3-7, rue Sainte-Hélène
  • Echasse (zur Steltz). Orfèvres, peintres, relieurs, imprimeurs, vitriers
    poêle V 55 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 15, rue du Dôme
  • Fleur (zur Blumen). Bouchers
    poêle IX 59 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 19, rue des Bouchers
  • Fribourgeois (Freiburger). Aubergistes, débitants de vin
    poêle IV 301 au plan Blondel, ultérieurement 6, rue des Fribourgeois (détruit, face au 19, rue des Francs-Bourgeois)
  • Gourmets (Weinsticher). Gourmets, perruquiers
    poêle III 258 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 23, rue de la Nuée-Bleue
  • Jardiniers (Gartner). Jardiniers
    poêle aux Charrons (Unterwagnern) I 284 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 7, Faubourg National
    poêle au Faubourg de Pierre (ane Steinstrass) II 107 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 47, rue du Faubourg de Pierre
    poêle à la Krutenau (ane Krautenau) X 371 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 3, rue de la Krutenau
  • Lanterne (zur Lucern). Meuniers, barbiers, chirurgiens, musiciens
    poêle IV 342 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 18, rue du Vieux-Marché-aux-Grains
  • Maréchaux (Schmitte). Forgerons, fondeurs d’étain, horlogers, ferblantiers, serruriers, couteliers, cloutiers, chaudronniers, arquebusiers, poulieurs, fondeurs, ceinturiers
    poêle VII 417 au plan Blondel, ultérieurement 138, Grand rue
  • Mauresse (zur Möhrin). Revendeurs, cordiers, chandeliers, apprêteurs de tabac, chanvriers
    poêle VII 397 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 7, rue du Vieux-Marché-aux-Poissons
  • Maçons (Maurer). Maçons, potiers, fabricants de porcelaine
    poêle V 31 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 9, rue des Juifs
  • Miroir (zum Spiegel). Marchands, chapeliers, passementiers, boutonniers, peigniers, brossiers, aiguilletiers
    poêle VII 421 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 29, rue des Serruriers
  • Pêcheurs (Fischer). Pêcheurs
    poêle IX 135 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 13, quai des Bateliers
  • Pelletiers (Kirschner). Pelletiers
    poêle IV 360 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 10, rue des Grandes-Arcades
  • Tailleurs (Schneider). Tailleurs
    poêle V 1 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 1, rue du Dôme
  • Tanneurs (Gerber). Tanneurs, parcheminiers, selliers
    poêle IV 226 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 13, rue des Drapiers
  • Tonneliers (Kieffer). Tonneliers, marchands de vins, brasseurs
    poêle VII 357 au plan Blondel, correspondant à l’actuel 5, quai Saint-Thomas

Numérotation traditionnelle des tribus et traduction en usage au XVIII° siècle

1. Encker (Ancre)
2. Spiegel (Miroir)
3. Blum (Fleur)
4. Freÿburger (Fribourgeois)
5. Tucher (Drapiers)
6. Lucern (Lanterne)
7. Mörin (Mauresse)
8. Steltz (Echasse)
9. Becker (Boulangers)
10. Kürschner (Pelletiers)
11. Kieffer, (Tonneliers)
12. Gerber (Tanneurs)
13. Weinsticher (Gourmets)
14. Schneider (Tailleurs)
15. Schmidt (Maréchaux)
16. Schumacher (Cordonniers)
17. Fischer (Pêcheurs)
18. Zimmerleuth (Charpentiers)
19. Gartner Unter Wagnern (Jardiniers aux Charrons)
20. Gartner ane Steinstraß (Jardiniers au Faubourg de Pierre)
21. Gartner ane Krautenau (Jardiniers à la Krutenau)
22. Ruprechtsau (Robertsau)
23. Maurer (Maçons)

Les membres acquittent un droit d’inscription (Zunfftrecht) et chaque trimestre (Fronfastengeld) une cotisation (Stubenrecht). Certains membres (le prévôt, le greffier) en sont exemptés, les veuves peuvent acquitter un droit réduit (voir les comptes de la tribu des cordonniers).

Les jeunes garçons entrent d’abord en apprentissage (Lehr) en devenant apprentis (Lehrjung). Ils sont ensuite compagnons (Gesell) et voyagent dans différentes villes. Après une période d’épreuve (Muthjahr) pour les étrangers à la ville, ils peuvent ensuite faire un chef d’œuvre (Meisterstück) qui leur permet de devenir maître. Sont tributaires (Zünfftig, Leibzünfftig) les maîtres et les compagnons qui n’ont pas l’intention de devenir maîtres puisque le chef d’œuvre doit être réalisé par un célibataire. Ceux qui exercent une profession non rattachée à une tribu (médecins, pasteurs, secrétaires, etc.) peuvent s’inscrire dans la tribu de leur choix.
Les jeunes du métier (compagnons et jeunes célibataires en général) sont encadrés par le patron (Stubenvatter), souvent tenancier de l’auberge qu’ils fréquentent.

wie daß es der gebrauch seÿe, wann die Ledige gesellschafft einen andern stuben vatter bekombt und ihren Einzug haltet, Mann dem neüen stuben Vatter eine Kanthe Zu Ver Ehren Pflegt (quand ils ont un nouveau patron, il est de tradition que les compagnons lui offrent un pichet lors de son entrée en fonction), Protocoles du Conseil de la tribu des Tailleurs, 1738 f° 126.v°


Note

Zunfft est traduit depuis le XVII° siècle par tribu, par analogie avec les institutions de Rome (comme pour sénat), où la tribu est une division du peuple. Comme une Zunfft, constituée d’un certain nombre de corps de métiers, participe au gouvernement de la Ville, la traduction par tribu est préférable à celle de corporation qui est une simple association d’artisans.


Les Maisons de Strasbourg sont présentées à l’aide de Word Press.