1752-1753, Extrait de procédure


Archives départementales de l’Isère, cote 2 B 1159

Extrait De la procédure criminelle instruite contre M. Le Préteur Pere à L’occasion de la compromission du nom de Mgr. le comte D’Argenson


cotte A
La déclaration des Srs. Mogg et Cappaun qui a donné les premiers mouvements à cette affaire porte qu’en 1748 les revenus de la ville de Strasbourg ayant été amodiés moyennant une somme annuelle de 792.000 lb au Sr. Du Crey, celui eut pour associés les Srs. Hannon, Staidel, Cappaun, Sadoul, Beck et La fermière ; qu’après l’adjudication le fermier principal et deux associés se rendirent chés M. le Préteur, pour convenir de la manière dont se partageroit les profits de cette ferme, dont M. le Préteur s’etoit réservé la moitié. qu’il proposa d’abord aux fermiers de lui assurer 50.000 lb par an et de lui remettre à cet effet des lettres de change ; que cette proposition fut agréée ; mais que l’execution en paroissant dangereuse, on partagea la ferme et les profits en vingts parts, dont dix ou la moitié appartiendroit au Preteur, et l’autre moitié partageable entre les associés.
Que pour participer à cette ferme, chacun fut obligé de donner à M. le Préteur 12.000 lb pour une part, ou pour un lot ; ce qui fut encor augmenté de 1200 lb par rapport à un bien appartenant à du Creiy et cédé par lui à M. le Préteur, et que la direction de cette affaire fut remise aux Srs. Diebolt et Daudet auxquels il confia ses vûës secrettes, qu’un des associés s’etant apperçu du dessous des cartes, céda sa part au Sr. Mogg moyennant 14.400 lb, et celle du Sr. Hannon fut partagée entre le associés. cette ferme allant mal, les fermiers prirent plusieurs résolutions qui furent empêchées par la ruse des malintentionés secondés de l’authorité du Préteur, de l’approbation duquel la caisse fut confiée au nommé Beck qui falsifia les etats, et vola cette caisse ; qu’on proposa plusieurs fois de partager les profits, ce qui fut éludé ; le but du préteur etant resté un mystére pour la plûpart des associés ; qu’enfin il se dévelopa, en annonçant lui même aux associés qu’il fit venir chés lui, que la ferme alloit être resiliée, et qu’il falloit se résoudre à representer les etats de leurs avances pour en être remboursés. Sur quoi ayant demandé leurs parts du profit qui se montoient pour dix huit mois a 120.000 lb au moins, cette demande ne satisfaisant pas le Préteur, il eut recours aux artifices, usant tour à tour de promesses brillantes, et de menaces de destitution ; ce qui les obligea de se prêter à ses vûës. que pour remboursement de leurs avances, Daudet leur proposa de prendre des lettres de change du Préteur, au lieu d’argent ; de sorte qu’il fallut renoncer à la moindre part du profit ; Que la Chambre d’economie abandonna à Daudet l’accise de la viande pour tenir lieu de dédomagement ; les revenus en provenans ayant été employés au remboursement des avances ; de sorte que le Préteur garda les sommes avancées par les associés, eut le bien du Sr. Du Crey, la totalité du profit de la ferme, et obtint, moyennant un canon de 25.000 lb les revenus de l’accise de la viande qui se montoient à 64.000 lb.
Le Sr. Mogg ajoûte par sa déclaration du 4 fev. que lorsque les associés insisterent au partage du bénéfice resultant de la ferme, Daudet leur répondit que le profit etoit mangé par les 60.000 lb que M. le Préteur avoit envoyées à Mgr le comte D’Argenson, et que pour cet effet, lui Daudet avoit pris des lettres de change chés Mrs. Kornemann. cette déclaration est dattée du 4 fev. 1752.

Le Lendemain 5 fév 1752, le Sr. Cappaun ajoûtat que la déclaration du Sr. Mogg etoit véritable, particuliérement en ce qui concerne l’addition pour les 60.000 lb que le Sr. Daudet a dit que M. le Préteur devoit donner à Mgr. le comte d’Argenson, sur le produit de la ferme de 1748 ; ne sachant pas si Daudet a dit positivement que ces lettres de change avoient été prises chés les Srs. Kornmann, ou chés les Srs. Dietrich et Hermani ./.

Cotte B
Le Sr. Mogg, par son interrogatoire subit dans les prisons de la citadelle de Strasbourg le 22 fev. 1752, s’est dit avocat général au grand senat âgé de 38 ans, et a répondu qu’il s’en référoit à ce qu’il avoit dit par sa déclaration du 4 fev. 1752, dont il a répété en substance le contenu ; que lorsque les associés parlerent du partage de profit de la ferme, Daudet répondit qu’il n’y en avoit aucun ; qu’il etoit absorbé par les 60.000 lb que M. le Préteur avoit envoyés à Mgr. le comte D’Argenson ; ce que Daudet lui a assuré positivement à plusieurs reprises ; et que même, Lui Daudet, avoit pris à ce sujet des lettres de change chés M. Kornmann ; ne pouvant cependant pas assurer positivement s’il dit que ces lettres de change avoient été prises chés le Sr. Kornmann, ou chés les Srs. Hermani et Dietrich ; que le Sr. Daudet ne fit pas un secret de cette affaire ; qu’il la leur avoit déclaré plusieurs fois, même en présence de l’épouse du Sr. Cappaun qui vit encore, et du Sr. Cappaun lui même, ainsi que du Sr. Lafermière qui est mort ; que M. le Préteur ne lui a jamais parlé de ce fait qu’il ne tient que du Sr. Daudet ; qu’ils en ont souvent parlé, entre eux associés, sans rien laisser transpirer au déhors, par respect pour Mgr. D’Argenson, sans lequel ils n’eussent point acquiescé à abandonner leur profit.

Cotte C.
Du même jour, le Sr. Cappaun Greffier de l’accise, âgé de 39 ans déclara par l’interrogatoire qu’il subit dans les prisons de la citadelle, qu’il s’en référoit à sa déclaration du 5 fev 1752 qu’il répéta en substance, et qu’ayant demandé à Daudet leurs parts dans le profit, celui ci leur avoit répondu que le profit etoit absorbé par les 60.000 lb que le Préteur avoit envoyées à Mgr. D’Argenson ; ce que ledit Daudet a répété très souvent, en présence de l’epouse de lui répondant qui pourra certifier ces faits ; que Daudet lui dit que cet envoi avoit été fait en lettres de change qu’il avoit prises, au nom de M. le Préteur, sur les nommés Hermani ou Kornmann, en se souvenant pas positivement lequel des deux ; Cappaun ajoûte qu’il y a environ un an que ces derniers faits se sont passés, et que daudet lui a assuré que ces lettres de change avoient été envoyées dans les commencements de la ferme de 1748 ; que ces 60.000 lb provenoient, non du produit de la ferme, mais des 120.000 lb données par les associés à M. de Préteur pour pots de vin ./.

Cotte D.
Du même jour, Daudet administrateur du magasin à sel, âgé de 49 ans déclarat par son interrogatoire subi dans les prisons de la citadelle, qu’après la résiliation du bail de 1748, le Sr. Sadoul lui fit cession de la ferme des accises sur la viande, pour rembourser les intéressés de la ferme des avances qu’ils avoient faites, et que M. de Préteur n’avoit aucune part dans cette accise. qu’il convient que si cette ferme eut duré son tems, lui répondant y eut gagné 30.000 lb, eu égard au Payment qu’il avoit à faire.
Qu’il n’a point dit au Srs. Mogg et Cappaun que les profits de la ferme fussent absorbés par les 60.000 lb que M. le Préteur avoit envoyées à Mgr. D’Argenson ; qu’il n’a jamais prononcé, à ce sujet, le nom de Mgr. d’Argenson, ni qu’il ne lui a jamais envoyé aucunes lettres de change à lui même, ou à qui que ce soit pour les lui remettre ; qu’à l’occasion de la ferme générale et de celle de l’accise sur la viande, il n’a fait aucune convention avec M. le Préteur.

Cotte E.
Du même jour, le Sr. Mogg confronté à Daudet, ce dernier a dit que tous les faits énoncés par le Sr. Mogg etoient faux ; qu’il ne lui avoit jamais nommé Mgr. d’Argenson ; qu’il ne lui avoit jamais envoyé de lettres de change, ni à personne pour lui remettre ; qu’il en avoit envoyé plusieurs à Paris, de la part de M. le Préteur, adressées au Sr. François pour acquitter des dettes dudit Préteur ; et par le Sr. Mogg a été dit, que tous les faits portés dans son interrogatoire sont vrais, les a ainsi soutenus, et a persisté.
Le Sr. Cappaun a été confronté tout de suite au Sr. Daudet qui a nié les faits contenus dans l’interrogatoire du Sr. Cappaun, et le Sr. Cappaun les a soutenu vrais ./.

Cotte F.
Lettre de M. de Fienne commandant de la citadelle à M. D’Esnans du 23 fev. 1752, en accompagnement d’une du Sr. Daudet dattée du même jour portant qu’il avoit été si troublé de l’etat dans lequel il se trouva la veille, qu’il ne pouvoit se ressouvenir de ce qu’il avoit dit à M. D’Esnans, et qu’il le prie de vouloir bien l’entendre de nouveau.

Cotte G.
En conséquence de ces deux lettres, le Sr. Daudet interrogé de nouveau, a déclaré le 24 fev. 1752, qu’en discourant avec M. le Préteur concernant les affaires de la ferme de 1748, il falloit faire entendre aux associés de cette ferme que lui Préteur à cette occasion faisoit differentes remises à la cour, à ce qu’il croit à Mgr. d’Argenson, mais que jamais ces remises n’ont été effectuées ; et que le propos du Préteur à cet égard, n’etoit que pour calmer les associés sur les avances qu’ils lui avoient faites ; ce qui engagea, lui répondant, de tenir le même langage aux associés, ne se resouvenant pas absolument s’il leur a nommé Mgr. d’Argenson ; mais qu’il croit ne leur avoir parlé que d’argent envoyé à la Cour ; que ce qu’il en a fait est en conséquence du discours du Préteur à qui il ne pouvoit rien refuser, et qu’il implore à ce sujet la miséricorde de Mgr. d’Argenson ; qu’il croit se ressouvenir que le Préteur le chargea d’insinuer aux associés que cet envoy à la cour devoit être de 60.000 lb ou environ ; et que ledit Préteur ne peut lui avoir tenu ce propos que dans la vûë qu’il le diroit ainsi aux associés ; que le but du Préteur à cette occasion etoit que les associés de la ferme ne trouvassent point étrange les sommes qu’ils lui avoient données pour pots de vin. il ajoûte trés positivement que jamais ces sommes n’ont été réellement envoyées, et que ce n’etoit pas le but du Préteur ; qu’il ne peut assurer positivement si Mgr. d’Argenson a été nommé ; ajoûte qu’il n’a jamais parlé de cette affaire qu’aux associés, et non à d’autres, qu’il n’en a jamais rendu compte à M. le Préteur ; que dans la ferme générale M. le Préteur sous le nom de Diebolt y etoit pour moitié et que pour la ferme de l’accise sur la viande qui fut cédée à lui Daudet par Sadoul, lui Daudet ne faisoit que prêter son nom à M. le Préteur avec lequel il n’a fait que des conventions verbales à ce sujet ; que s’il s’est énoncé autrement dans son précédent interrogatoire, c’est à cause du trouble où il se trouva lors de sa détention. il ajoûte encor qu’il a une idée sure que M. le Préteur lui a dit les faits énoncés ci dessus, et qu’il le soutiendra ./.

Cotte H
Du même jour 24 fev. 1752 les Srs. Mogg et Daudet confrontés ont déclaré se connoître, et Daudet n’a fait d’autres reproches à Mogg que sur son interêt dans la ferme de 1748. lecture faite au Sr. Mogg du second interrogatoire de Daudet, le Sr. Mogg a persisté à soutenir que ledit Daudet lui avoit assuré que l’envoi des 60.000 lb etoient pour Mgr d’Argenson de la part du préteur et que Daudet le lui avoit répété plusieurs fois, en présence du Sr. Cappaun. Par Daudet il a été dit qu’il s’en référe à son interrogatoire du même jour, qu’il en se souvient pas d’avoir prononcé le nom de Mgr d’Argenson ; par le Sr. Mogg a été répliqué que s’il n’eut pas prononcé le nom de Mgr d’Argenson il n’eut jamais consenti à l’accomodement qui fut fait en conséquence.

Lecture faite au Sr. Daudet de l’interrogatoire du Sr. Mogg du 22 fev., Daudet a déclaré qu’il s’en référoit à son interrogatoire, et le Sr. Mogg a persisté.

Cotte I.
Du même jour 24 fev. les Srs. Cappaun et Daudet furent confrontés sur leurs interrogatoires. ils ont déclaré qu’ils se connoissoient et qu’ils n’avoient aucun reproche à fournir l’un contre l’autre. lecture faite au Sr. Capaun de l’interrogatoire subi par Daudet le présent jour, le Sr. Cappaun a soutenu à Daudet qu’il lui avoit dit plusieurs fois que l’envoi des 60.000 lb avoit été ou devoit être fait à Mgr d’Argenson, de la part du Préteur ; ce que Daudet lui avoit répété plus de vingt fois ; et par Daudet a été dit qu’il ne se souvient point d’avoir prononcé le nom de Mgr d’Argenson, ni même d’en avoir parlé à Cappaun aussi souvent qu’il le dit.
Lecture faite au Sr. Daudet de l’interrogatoire du Sr. Cappaun du 22 fev. le Sr. Daudet a déclaré qu’il s’en référoit à ses interrogatoires, et ils ont persisté chacun dans leur Dire ./.

Cotte K
Du même jour et ensuite des confrontations dont il vient d’être fait mention, le Sr. Daudet ayant demandé d’être interrogé de nouveau a déclaré qu’après avoir oüi, jusqu’à deux fois de suite, la lecture de son dernier interrogatoire, se rappellant les faits qui y ont donné lieu, il se ressouvient que M. le Préteur etant devant la cheminée lui nomma Mgr. le comte d’Argenson à l’occasion de la comission qu’il lui donné de parler aux associés, et qu’au cas que lui répondant eut nommé Mgr. d’Argenson aux associés de la ferme, ce dont il ne se ressouvient pas, il n’eut point été si osé de le faire, si M. le Préteur, comme il s’en ressouvient a présent, ne l’eut nommé lui même ; ce qu’il offre d’affirmer à qui besoin sera ./.

cotte L.
Interrogatoire subi par M. le Préteur le Pere du 25 fev. 1752 à l’hotel de M. de Fienne commandant de la Citadelle, par lequel il déclare qu’il n’a jamais été d’aucune part dans la ferme de 1748, qu’on lui a seulement donné une somme pour pots de vin du montant de laquelle il ne se ressouvient pas ; qu’il croit cependant qu’elle allat à 30.000 lb ou 40.000 lb ; que le magistrat ayant résilié le bail de 1748, nonobstant les remontrances on donna à Sadoul la ferme de l’accise en dédommagement, et a charge de rembourser les sommes avancées par les fermiers pour pots de vin à lui répondant ; que Daudet fut mis en place de Sadoul et acquitta toutes ses avances ; qu’il fut fondé à prendre ces pots de vin sur ce que Mrs. de Gayl, Faucht, et Milnehem lui dirent qu’il etoit juste que faisant les honneurs de la ville il en fut dédomagé, sur les secours de l’accise dont Daudet fut chargé ; et que l’intention du magistrat fut qu’on tint compte à lui répondant du produit de cette ferme, et du re*, ce qui a été executé. qu’il n’a jamais parlé aux fermiers de l’envoy de 60.000 lb à Mgr. d’Argenson, qu’il n’a jamais été question de pareille proposition faite de sa part à Daudet ; assurant très positivement qu’il n’a jamais envoyé cette somme à Mgr. d’Argenson ; qu’il n’a jamais été question non plus d’envoyer des lettres de change à la cour, mais seulement au Sr. François pour 30.000 lb avec les intérêts qu’il lui devoit, pourquoi Daudet prit des lettres de change chés le Sr. Hermani ; qu’il a fait acquiter de même 17.000 lb qu’il devoit au Sr. Andrieux à Paris.

cotte M.
Du même jour 25 fev. , M. le Préteur et Daudet furent confrontés à L’hotel de M. de Fienne commandant de la citadelle. ils ont déclaré se connoître, et n’avoir aucuns reproches à fournir.
Lecture faite à M. le Préteur de l’interrogatoire du Sr. Daudet du 24 fev. le dit Daudet a persisté et par M. de Klinglin a été dit qu’il n’a touché que les pots de vin dont il a été fait mention, et qu’il inficie formellement tout le contenu des deux interrogatoires de Daudet, et par Daudet a été dit que les faits en sont véritables, que c’est de M. de Klinglin dont il a entendu parler, et l’a ainsi soutenu ./.

Cotte N.
Declaration de la femme du Sr. Cappaun dont il a été parlé ci devant du 23 fev. 1752, portant que le Sr. Daudet est souvent venu chés elle, et que lui ayant demandé dans quel état étoit les affaires de la ferme, attendu que son mari y avoit compris les biens d’elle comparante, Daudet lui avoit répondu différentes fois que M. Le Préteur avoit été obligé d’envoyer à Mgr. d’Argenson une somme de 60.000 lb en lettres de change du Sr. Hermani ou Kornemann, ne se ressouvenant duquel des deux. laquelle déclaration elle étoit prête de soutenir en présence du Sr. Daudet.
Mde. Cappaun n’a point été confrontée à Daudet ni à M. le Préteur ; M. D’Esnans n’ayant eu aucun ordre à ce sujet.

Cotte O.
interrogatoire du Sr Daudet du 8 mars 1752 portant que parmi les lettres de change qu’il a prises à différentes fois chés les Srs. Hermani et Kornemann, il n’y en avoit aucune qui fut adressée de la part de M. le Préteur à Mgr. D’Argenson, ou à quelqu’un pour les lui rendre, dans le courant des années 1748, 1749, 1750 et 1751 ; que les lettres de change qu’il a prises en 1749 chés le Sr. Hermani à son ordre sur M. de Monmartel ont été prises pour le compte de M. Salomon receveur général des domaines et bois, dont lui répondant est l’agent en Alsace, comme il seroit facile d’en justifier, par les endossemens des lettres de change et par les journaux de M. Salomon ; que les lettres de change qu’il a prises en 1748 chés le Sr. Hermani sur M. de Monmartel ont eu le même objet, et qu’il est possible que quelques unes ayent été adressées au Sr. Andrieux à Paris, de la part de M. de Préteur, et pour ses affaires particuliéres ; ce qui pouvoit se vérifier par l’endossement de ces lettres ; que parmi ces lettres de change, il y en a deux ; l’une de 37.558 lb 4 s 8 d et l’autre de 1746 lb 6 d, qu’il a prises par ordre de M. le Préteur, pour les faire passer au Sr. François receveur des tailles auquel M. le Préteur devoit pareille somme sur trois billets que le Sr. François a renvoyés acquittés ; et justement il a ajoûté que 1746 lb auroient été adressées au Sr. Andrieux pour les affaires particulieres de M. le Préteur ; qu’il assure positivement, pour en avoir une entiére connoissance, que ces sommes ont été employées à l’acquittement des dettes de M. le Préteur : ajoûte encor que les lettres de change qu’il a envoyées en 1749 ont été adressées à M. Salomon et pour son compte, et qu’il ne se ressouvient pas d’en avoir jamais pris aucune chés les Srs. Kornmann de la part de M. le Préteur ou de la sienne. déclare encor qu’il n’a aucune connoissance, soit par lui même, ou par oui-dire que M. le Préteur ait adressé à Mgr. d’Argenson aucune lettre de change directement ou indirectement, instamment il a prié le commissaire de lui permettre d’ecrire une lettre à M. Salomon pour vérifier les faits énoncés dans son interrogatoire, pour connoître l’endossement des lettres de change, et à qui elles etoient adressées ./.

Cotte P.
Déclaration du Sr. Sadoul du 23 fev. 1752 portant qu’en 1748 il entrat dans la societé de la ferme générale pour un sol, ladite societé ayant été partagée en vingts parts, dont M. le Préteur étoit pour une moitié ; que pour avoir cette part d’un sol il fut obligé de donner 12.000 lb au nommé Beck qu’on lui dit être pour M. le Préteur et de plus 1500 lb pour sa part du prix de la maison de campagne que du Crey avoit donnée à M. de Préteur ; que tant que la ferme a duré, il n’en a retiré aucun profit ; et qu’il l’a remise à Daudet qui l’a remise ensuite à M. de Préteur, à ce qu’il croit ; que la chambre d’Economie ayant résilié cette ferme, elle lui accorda par forme de dédommagement l’accise sur la viande pour quatre ans et demi ; qu’il n’a rien touché du profit de cette ferme ; qu’elle a été remise à Daudet qu’il croit être l’homme d’affaires du préteur et son prête-nom : que M. le Préteur lui a dit à deux différentes fois, et deux années de suite de lui remettre 1200 lb à chaque fois pour envoyer à la cour, à l’effet d’empêcher qu’on ait une garnison suisse à Strasbourg, et que lui Sadoul a compté ces deux sommes à M. le Préteur.
a la suite est une 2de déclaration du 7 mars 1752 portant que les premiers 1200 lb ont été donnés par lui à M. le Préteur en l’année 1749 et en argent ; que les autres 1200 lb ont été remises en une lettre de change du Sr. Kornmann sur Paris à l’ordre de M. le Préteur ; ne sachant quel usage il a fait de l’une et de l’autre ./.

Cotte Q.
Interrogatoire du Sr Daudet à ce sujet du 9 mars 1752 portant qu’en l’année 1749, il a été question d’envoyer à la cour 1200 lb pour ne pas avoir à Strasbourg une garnison suisse mais qu’il ignore à qui cette somme fut envoyée ; qu’il ignore de même si pareille somme fut envoyée en 1750, mais qu’on pouvoit en avoir une connoissance plus particuliere par les comptes de la ferme, et que le Sr. Sadoul a en mains tous les régistres de cette ferme ./.

Cotte R.
M. le Préteur Pere interrogé à ce sujet le 9 mars 1752 a répondu que les garnisons suisses ayant des priviléges onereux aux villes, il est d’usage, sans en être absolument sûr, d’envoyer des gratifications pour avoir d’autres garnisons ; qu’en 1749 et 1750 on a envoyé en effet 1200 lb par année pour eviter cette garnison suisse a M. Rotisset* secretaire de Mgr. d’Argenson, par le ministére du Sr. Andrieux, et en lettres de change ; que cet envoi n’a été fait que pour 1749 et 1750. il ajoûte ensuite qu’il n’etoit point de moitié de la ferme de 1748 sous le nom de Diebold ; mais qu’après cette adjudication les fermiers lui apporterent à differens jours 30.000 lb à 40.000 par forme de pots de vin dans lesquelles les 12.000 lb dont parle Sadoul ont été compris ; que la maison de Ducrey ne lui a point été donnée gratuitement, mais qu’il en a payé 10.000 à 12.000 lb ; que la ferme ayant été resiliée ont donna aux fermiers un dédomagement de 23.000 à 24.000 lb ; que le Sr. Sadoul remit cette affaire entre les mains du Sr. Daudet qui donna au répondant, en gratification, ce qui restat aprés les remboursements faits aux fermiers ; l’intention de la chambre d’Economie ayant été de faire trouver à lui répondant des secours extraordinaires pour les dépenses qu’il faisoit pour les honneurs de la ville. il parle ensuite des services qu’il a rendus tant au Roy qu’à la ville de Strasbourg, ainsi que des fêtes qu’il a données en differens temps ./.

Cotte S.
Du 9 mars 1752 le Sr. Sadoul confronté à M. le Préteur Pere, ils ont déclaré se connoître, et M. le Préteur a dit pour reproches contre Sadoul qu’ils etoient en procés à l’occasion du payment d’une ferme, ce qui a été dénié par Sadoul. Lecture faite à M. le Préteur de la déclaration de Sadoul M. le Préteur a déclaré qu’il s’en référoit à son précédent interrogatoire, et qu’il niait le surplus des faits énoncés dans cette déclaration. Sadoul y a persisté, et les a soutenus vrays ./.

Cotte T
Déclaration du Sr. Hermani du 23 fev. 1752 avec procés verbal d’examen de ses livres de caisse, à commencer di 31 Xbre 1747, jusqu’au 23 fev. 1752 ; pour justifier des lettres de change prises chés lui par Daudet ou par M. le Préteur pour Paris ou pour la cour, par lequel il conste que les lettres de change prises chés lui par Daudet sont relatives à ce qui est énoncé dans l’interrogatoire dudit Daudet.

Cotte V
Du 26 fev. 1752 autre procés verbal concernant le même sujet, et conforme à l’interrogatoire de Daudet ./.

cotte X.
Interrogatoire de M. le Préteur Pere du 11 mars 1752 par lequel il s’explique à peu près dans les mêmes termes qu’il avoit fait précédemment concernant la ferme de 1748. ajoûte seulement que les fermiers donnérent différens pots d evin aux députés du magistrat, sans pouvoir se ressouvenir de leurs noms et qui ils etoient, qu’ils lui en offrirent à lui d’équivalens à la moitié du produit de la ferme ; qu’il n’a jamais été question, sur le prix de cette ferme, d’envoyer à Mgr. d’Argenson une somme de 60.000 lb, qu’il n’a jamais donné cette commission à Daudet, qui pourroit avoir inventé cette histoire pour se donner du crédit parmi les fermiers ; que Daudet même ne lui a jamais dit qu’il leur eut fait une pareille proposition, et que les fermiers ne lui en ont jamais parlé non plus ; Qu’il n’a point avancé qu’il eut envoyé de l’argent à la cour, mais qu’il est possible qu’il ait parlé de différens frais de voyage qu’il etoit obligé d’y faire. il entre ensuite dans le détail des lettres de change envoyées par Daudet à Paris, et il s’explique à cet égard dans les mêmes termes que daudet dans son interrogatoire. le surplus de cet acte paroit inutile à rapporter.

Cotte Z.
Du 21 mars 1752 M. le Préteur Pere interrogé concernant l’affaire de Raphaël Levi dont il sera parlé dans la procédure concernant M. de Klinglin fils, a repondu qu’il n’avoit aucune connoissance de ce qui pouvoit avoir donné lieu à cette affaire, ni même de ce qui s’etoit passé à ce sujet entre son fils et ledit Raphaël Levi ; qu’il scait seulement qu’un nommé Blienne juif a fait à ce sujet un accomodement avec son fils, et que lui répondant a payé en conséquence 24.000 lb pour sondit fils qui a toujours soutenu n’avoir jamais reçu en entier la somme de 60.000 lb que Raphaël Levi prétendoit lui avoir prêtée, et que cette somme provenoit d’intérêts usuraires.
il a déclaré ensuite n’avoir jamais donné commission à l’abbé Brenny de demander de l’argent à Scheffer à l’occasion des boucheries ; et qu’il n’a jamais parlé audit abbé d’argent à envoyer de sa part à la cour ./.

cotte A.A.
Declaration de trois bouchers de la ville de Strasbourg du 11 Mars 1752 portant que s’etant assemblés au nom de la tribu des bouchers en 1750 pour traiter avec le Sr. Scheffer à l’occasion de la ferme des Peaux, Scheffer leur dit qu’il n’avoit qu’à remettre leur argent à M. de Préteur, et qu’il l’accepteroit dans un chapeau à découvert, qu’ils ne devoient pas croire que le tout fut pour le Préteur, qu’il etoit obligé d’en envoyer la plus grande partie en cour

Cotte B.B.
Déclaration du Sr. Scheffer du 10 mars 1752 portant que l’abbé Brenny homme de confiance de M. le Préteur a dit chés lui qu’il n’y avoit que lui et M. le Préteur qui sussent les sommes que ledit Préteur etoit obligé d’envoyer en cour ; que s’il recevoit des presens, la plus petite partie lui en restoit ./.

Cotte C.C.
Déclaration de la femme du Sr. Scheffer dans les mêmes termes à peu près que celle de son mari dont il vient d’être fait mention.

Cotte D.D.
Etat des lettres de change et éffets dont il a été compté à M. Salomon depuis 1747 jusqu’en 1751 pour le Sr. Daudet agent dudit Sr. Salomon, pour justifier le dire du Sr. Daudet dans son interrogatoire à ce sujet.

Cotte E.E.
Du 24 mars 1752 M. le Préteur Pere interrogé, à sa réquisition, a repondu qu’il ne se souvient point d’avoir jamais compromis le nom de Mgr. d’Argenson ; que toute cette affaire lui a été suscitée par une conjuration du magistrat contre lui, dont il demande d’être informé ; que M. le Stattmaistre de Gail en est un des principaux auteurs ; que l’objet principal a été l’établissement de l’alternative dans l’université de Strasbourg, entre les catholiques et les Luthériens ; que Mrs. Fabre et Mogg etoient à la tête de ces derniers ainsi que le Sr. Fauscht ; M. le Préteur prétend qu’à l’occasion de cette affaire on suscita contre lui une partie du magistrat, et que dés lors on forma le projet de le dépouiller de son authorité et de le perdre. il entre dans un détail qui paroit assés inutile sur ces différens faits, et prétend que les mesures prises à ce sujet ont réüssi : que dés lors on a suscité contre lui, dans la ville, des accusateurs de porte en porte ; qu’ayant été dits à M. de Gail qu’on avoit donné une gratification de 1000 écus à M. Fabre, à l’occasion du terrier du ban de Dorlisheim, M. de Gail dit qu’il ne falloit parler de ce fait à personne. il cite ensuite quelques exemples d’une prétenduë pareille cabale formée autrefois, et notamment en 1740 : il prétend que tous ceux qui ont déposé et déclaré quelque chose contre lui sont dans le même cas. que s’il a reçu des presens, il est dans le cas de tous les autres officiers du magistrat tels que Mrs. Reichoffer, Fabre, Langhans amaistre régent qui a reçu 25 louis, une toilette d’argents pour son épouse, et dans la maison duquel les ouvriers travaillent gratuitement ./.

Cotte F.F.
Lettre du Sr. Staedel à Mgr. le comte d’Argenson portant que M. le Préteur ayant fait avec le nommé Banbini du 1er janv 1750 une convention pour un opéra italien à Strasbourg, pendant 15 mois moyennant 33.000 lb que ledit Préteur feroit remettre à Banbini, que M. le Préteur le chargeoit lui Staedel de cette direction et il se trouve qu’il a avancé à ce sujet 36.147 lb dont M. le Préteur refusa le payment. il demande justice à ce sujet à Mgr. d’Argenson.

Cotte G. G.
Convention entre M. le Préteur et Banbini pour un opéra italien du 1er janv 1750 portant que Banbini se charge de cette entreprise pendant 15 mois, sous les ordres de M. le Préteur, moyennant la somme de 33.000 lb payable par ledit Préteur qui se reserve le droit de percevoir l’argent de la porte.

Cotte H.H.
Extrait des régistres de la chambre des treize du 9 janv. 1751 portant que M. de Klinglin fils a dit que pour terminer les difficultés entre l’etat major et le magistrat concernant la juridiction et la police de la comédie, on a trouvé un expédient approuvé par Mgr. d’Argenson et par M. le maréchal de Coigny, sur la proposition que M. de Klinglin pere leur a faite, qui est que la ville se chargera à l’avenir de la comédie ; sur quoi lecture ayant été faite de ce projet, M. de Klinglin fils dit que la chambre, si elle ne l’approuvoit pas, auroit lieu d’apréhender qu’elle ne s’attirat le mécontentement et l’indignation des ministres, et que dans la suite la cour ne l’obligeat à cette entreprise.
ce projet a en effet été exécuté, et l’on a vû ailleurs que cette entreprise coute à la ville 28.000 lb par an.

Cotte I. I.
M le Préteur interrogé sur ce fait le 26 mars 1752 convient du marché fait avec Banbini moyennant une somme, et que le Sr. Staedel se charge de cette entreprise ; que jamais Mgr. d’Argenson ne lui dit que ce fut son intention que la ville se chargea à son tour de la comédie ; et qu’il n’a donné a M. son fils aucune commission relative à ce qui s’est passé au magistrat le 9 janv. 1751, bien moins encor que le menacer de l’indignation du ministre ; que même jamais M. son fils ne lui a fait part de ce qui s’etoit passé au magistrat à ce sujet ; et que lui répondant n’a jamais écrit ni parlé de cette affaire à Mgr. d’Argenson.

Cotte K.K.
Autre interrogatoire de M. le Préteur du 31 mars 1752 contenant, à peu près les mêmes raisons déjà alléguées par lui, et ajoûtant que les prétendus propos qu’on lui fait tenir concernant Mgr. le comte d’Argenson ne peuvent venir que des personnes subornées par ses ennemis. il y est encor dit que si l’on peut prouver qu’on lui ait donné quelque gratification que volontairement, il s’offre d’en faire la restitution, et de s’en rapporter à la décision des juges que la cour pouvoit nommer à cet effet ; que l’animosité du magistrat contre lui vient encor de ce qu’il a voulut réduire leurs émolumens sur l’ancien pied.

L’affaire concernant Raphaël Levi, et la compromission de Mgr. d’Argenson par M. de Klinglin fils est détaillée dans la procédure instruite contre mondit Sr. de Klinglin fils ; cependant comme M. d’Esnans veut ordre de confronter Raphaël Levi et ses deux fils à M. de Préteur Pere, on joint ici ces trois actes de confrontation. le surplus de piéces se trouvera dans la procédure instruite à ce sujet contre M. de Klinglin fils.

Cotte L.L.
Du 23 mars 1752, confrontation de Raphaël Levi avec M. de Klinglin pere par laquelle ils déclarent se connoître, et M. de Klinglin Préteur reproche Raphaël sur ce qu’il a suscité pour déposer contre lui par le complot de ses ennemis ; par Raphaël Levi a été dit qu’il n’avoit aucune animosité contre lui. lecture faite des interrogatoires et déclarations de Raphaël Levi à M. de Préteur, il les a inficiés, en ce qui le concerne, et déclaré qu’il ignore ce qui s’est passé entre son fils et ledit Raphaël ; celui ci a persisté et a soutenu son dire.

Cotte M.M.
Le même jour Leon Levi fut confronté à M. le Préteur pere qui a fournit contre lui les mêmes reproches que contre le précédent. M. le Préteur a nié ce qui le concerne, et Leon Levi l’a soutenu.

Cotte N.N.
Le même jour Michel Levi fut confronté à M. de Préteur pere, cet acte est dans les mêmes termes que les précédents.

Cotte O.O.
Interrogatoire de M. le Préteur du 16 avril 1752 par lequel il n’énonce aucun fait nouveau.

Cotte P.P.
Autre interrogatoire de M. le Préteur du 23 avril 1752 portant qu’il n’a jamais donné comission à son fils de faire aucune proposition au magistrat concernant l’entreprise de la comédie, ni d’aucun ordre reçu à ce sujet de Mgr. d’Argenson. il prétend que les mémoires remis au commissaire contre luy sont une suite de la subordination de ses ennemis. il finit par demander à se justifier sur tous les faits qu’on lui impute

Cotte Q.Q.
Dernier interrogatoire de M. le Préteur du 30 avril 1752 portant que si Daudet n’a pas parlé dans son 1er interrogatoire des 60.000 lb envoyés à Mgr d’Argenson, et s’il n’en a fait mention que dans le 2e cette déclaration doit être regardée comme méditée par Daudet, pour se justifier aux dépens du Répondeur du propos insolent qu’il a tenu ; que Daudet est d’ailleurs un homme imprudent et pétulant dans sa façon de parler ; que cette histoire de Daudet n’a même été relevée que dans le tems de la plus grande fermentation des esprits du magistrat contre le répondant ; que les ennemis ont profité de cette occasion pour lui en faire un crime. il finit par demander son élargissement pour parvenir aux preuves les plus manifestes de sa justification ./.


Les Maisons de Strasbourg sont présentées à l’aide de Word Press.